jeudi 2 octobre 2008

L’attente…

J’attends...

Mardi dernier, j’ai rencontré le Docteur Chan pour un dernier suivi de mon opération de mai dernier. En quittant, il m’a serré chaudement les mains entre les siennes, me souhaitant la meilleure des chances. Lui aussi m’a confirmé que la récidive était loin d’être encourageante dans mon cas, vu la force de son emprise. Toutefois, il admet la possibilité que d’autres protocoles de chimiothérapie pourraient m’être bénéfiques, me donner un peu de temps…malgré les tristes statistiques de survie. J’oublie parfois que mon cancer est de stade IV, grade III, ce qui veut dire au sommet de l’échelle…Je crois qu’il me faudra croire aux miracles, si je veux m’en sortir vivante… !

J’attends aussi des réponses. Mes résultats d’analyses de mon scan de mercredi ne me seront donnés que le 9 octobre prochain…
J’attends donc…
Je me sens assise entre deux chaises… qui sont loin d’être confortables !
J’attends…
C’est difficile d’attendre, je trouve…

C’est fou ce que l’attente peut provoquer comme réflexions…
Si vous saviez combien ça bouge dans ma tête. À vrai dire, ça surchauffe !
Je ne comprends toujours pas pourquoi ma vie devrait s’achever si rapidement. Il me semble que j’ai encore tant à faire. Encore à donner, encore à apprendre, et surtout encore à expérimenter et à vivre.
La semaine dernière, alors que je tondais l’herbe qui poussait dans les sentiers de mon bois, j’ai piqué une de ses crises de colère. Je maudissais le compte à rebours qui tictaque dans ma tête malgré moi … Pas joli à voir… Heureusement, mes témoins n’étaient que des lièvres, des oiseaux, des mulots et des grenouilles… J’étais profondément révoltée. Je veux bien accepter ce que la Vie me demande, mais j’aimerais surtout comprendre son processus décisionnel, sa stratégie, sa tactique et surtout sa logique…

La mort…
Je n’ai jamais autant réfléchi sur la mort…
On peut dire que j’apprivoise davantage l’idée qu’elle imposera une fin incontournable à mon existence corporelle.
Aussi ridicule que ce soit, j’ai aussi compris que sans la mort, le temps n’existerait pas…
Sans elle, notre vie ne serait plus régie par les heures, les jours, les mois, les années… Nous serions immortels, alors pourquoi s’embarrasser de la notion du temps ? Malheureusement, nous ne pourrions plus conférer un sens à chacun des instants de notre vie…?

Avez-vous remarqué combien la mort ne semble plus faire partie de la vie ? À la télévision, dans les journaux, la mort est exhibée tous les jours, sous un flot d’images qui s’activent autour des derniers instants de purs inconnus. Trop souvent, on nous la détaille dans toute sa violence et sa grande tristesse. Ces photos qu’on nous bombarde ne manifestent pas toujours le respect de l’intimité à laquelle tout être humain à droit au moment de son décès… Enfin, il me semble ! Je me demande si, à la longue, cette omniprésence de la mort dans notre quotidien ne vient pas tout simplement banaliser notre propre fin, au point de se croire dispensé de réfléchir à sa propre mort… Dommage !

Je sais bien que ce n’est pas en évacuant de mon esprit l’idée de ma propre finitude que je réussirai à déjouer la mort, même si je suis tentée à maintes reprises d’y croire…C’est une mauvaise manœuvre… Ce n’est pas en gonflant le prix que j’accorde à ma vie, que cela diminuera pour autant l’importance de la mort et la place qu’elle tient au sein de ma propre vie.
On dit que la mort est l’acte ultime de sa vie… Je m’y prépare donc. Même si je suis en colère contre elle parce qu’elle me guette de trop près. Même si je veux me battre pour prolonger ma vie le plus longtemps possible encore sur cette planète. Même s’il m’arrive plusieurs fois par jour, et surtout la nuit, de renier l’existence de mon cancer et la force qu’il manifeste, en m’accrochant désespérément au pouvoir de ma volonté pour vaincre le mal physique qui me gruge. Les miracles existent…

Oui j’aime la Vie. Elle est tellement belle, magnifique, grandiose, sublime et unique… Mais je sais bien que ni sa beauté, sa magnificence, sa grandeur, sa sublimité n’auront le pouvoir de vaincre la mort lorsque viendra le moment de l’affronter puisque elle est une nécessité incontournable, indispensable à la vie.

L’attente…
Si vous saviez combien je carbure à l’espérance, à la confiance, malgré le doute amer parfois qui vient me dissuader de croire en ma propre survie…
Maudit que c’est difficile !
J’ai l’impression d’être un yoyo… J’ai des hauts et des bas. J’ai confiance et parfois je désespère…
C’est fou, il y a de ces moments où j’aimerais pouvoir négocier avec la mort…
Si vous saviez combien je souhaite vivre encore quelques années de ce côté-ci du miroir…Voir mes enfants devenir de véritables adultes. D’être grand-mère et tenir mes petits-enfants entre mes bras. Chanter, oui, chanter à tue-tête avec chacun d’eux et rire. Oui, rire…Beaucoup. Vivre longtemps auprès de mon Pierre.

Mais je n’ai rien à offrir à la mort en échange… à part ma vie évidemment !

Bon sang ! Prenez soin de votre santé… Retardez le plus loin possible ce face-à-face fatal que la Vie nous oblige d’expérimenter. Nous oublions trop souvent que notre corps n’est pas immortel…

En attendant, n’oubliez pas que je vous aime…

Claire.

5 commentaires:

Cath a dit…

Tu sais, nous aussi on a de la difficulté à croire que ne sera pas toujours là, avec nous. Nous aussi on voudrait te voir avec tes petits-enfants, que tu puisses leur raconter les conneries qu'on faisait, que tu puisses leur chanter des chansons, leur raconter des histoires. Il n'y a personne d'autres que toi qui peut chanter "Tant qu'il y aura des étoiles"... avec notre version du bonheur aux légumes... ou jouer Catherine en tricycle... Ça va être difficile de t'enregistrer en faisant ça... ça ne sera pas pareil qu'en vrai. J'aime mieux le vrai... Je sais bien qu'un jour tu vas partir, mais pas tout de suite... pas cette année, pas cette décennie... et ni la prochaine si on peut...

Je t'aime aussi,

Anonyme a dit…

Je te serre tres tres fort dans mes bras. Je vous trouves toi et toute ta tite famille extraordinaire. J'aurais aimer mieux vous connaitre car vous avez des valeurs admirables mais la vie en a decider autrement.

Je veux juste vous dire de continuer a vous serrer les coudes car c'est tous et chacun de vous qui vivez ce drame avec des pensées et des réactions differentes.

Continuer a partagées vos emotions et vos reactions (bonnes ou mauvaises)entre vous et a vous communiquer vos sentiments comme vous semblez etre capable de le faire si bien

Un ti cousin qui ne sais pas trop quoi dire


Reynald

Anonyme a dit…

Allo Claire,

Ca fait trop long temps pout moi ecrire quelque mots parce que acunne mot pout m'exprimer. Je suis la fille chinoise qui a passe la meilleur Nouvelle année chez toi. Je me souveille tout le temps la nourriture, la jeu "cadeau volet", la piano, tes chansons, et tes 9 chats. Et toi, la plus charlereure hôtee nous servir tout la nuit. Il y a plein d'amour et sourire chez vous. Tu'es une femme généreues,énergique et courageux. Je suis trise quan je sais tu es en train de soufrir de la grand douleur. Mes je suis tres fiere de toi pout ton courage. Ne quite pas! Allez! Allez!

Je t' embrasse fort!

Lijuan

Anonyme a dit…

Bonjour ClAIRE,

Si je peux te donner un petit peu d'espoir, je te raconterai à nouveau l'histoire d'un gars que j'ai connu à qui on avait dit qu'il lui restait deux semaines à vivre à cause d'un cancer généralisé.

Cela fait 20 ans déjà et il est toujours parmis nous, complètement guéri. Oui Claire les miracles existent, il suffit d'y croire.

Bon courage, je t'aime

Louise

Anonyme a dit…

ce qui peut peut-être sembler révoltant c'est que vous ne pouvez pas changer de place avec ceux qui ont le cancer de l'âme, qui sont en profonde dépression, ne souhaitent que mourir au plus vite. Tellement perdus dans leur solitude insupportable, la mort n'est que le seul remède à leur souffrance. Ils ont le corps pour jouir de la vie, ils semblent avoir tout pour jouir de la vie mais hélàs le coeur, les yeux, l'âme ne suivent pas.
et s'ils peuvent trouver solution à leur solitude intense, à leur inutilité, ils liront vos mots et se rattraperont en votre honneur.

Votre blog est super inspirant. Pas juste pour vos proches.

Merci, merci