jeudi 25 septembre 2008

Il fait tellement beau….

« Il n’y a qu’un temps pour être heureux : celui où, sans être désespéré,
on sait accueillir le bonheur de vivre. »
Flaubert


J’aime bien cette citation. Elle résume bien ma pensée…
Le 24 janvier dernier, quand on m’a confirmé que j’avais le cancer, j’ai compris que si je n’acceptais pas les traitements de chimio, il ne me resterait même pas une année à vivre. D’emblée, j’ai accepté de suivre la chimiothérapie. Pendant six mois, avec vous, je me suis battue, comme on dit… Dieu sait que mon corps a bien réagit. Merveilleusement bien d’ailleurs… Malheureusement pour beaucoup moins de temps qu’on était en mesure de s’attendre…

Ces temps-ci, je constate bien qu’il se passe des choses dans mon corps… Je deviens rapidement fatiguée… J’ai énormément besoin de sommeil…

Oui… Le cancer demeure bien vivant. Il se prépare à l’attaque… Je me rends compte qu’il est puissant. Fort. Entêté. Il veut toute la place… J’ai bien peur qu’il gagne…

Le cancer des ovaires quand il se métastase se promène dans le corps en empruntant la circulation sanguine. C’est ainsi qu’il s’amuse à coloniser d'autres organes comme le cerveau, les os, les poumons ou les viscères. Une vraie guérilla ! C’est ce qui se passe dans le moment… J’ai beau vouloir me battre, avouez que c’est difficile parfois de croire aux miracles ! Je ne démissionne pas. Je vais suivre toutes les chimiothérapies qu’on sera en mesure de m’offrir… mais il viendra bien un moment, où l’acharnement aura ses limites…

Quelle bataille ! Différente…
On dirait que cette fois-ci le cœur n’y est pas… le combat m’épuise…
On dirait que cette fois-ci, j’accepte tout bonnement, tout naturellement, de ne plus faire de projets à long terme…
On dirait que cette fois-ci, ma routine a de plus en plus d’importance, et devient de plus en plus sécurisante face à l’inconnu…
On dirait que ces temps-ci, le compte à rebours ne me fait même pas peur…. C’est un drôle de jeu, sans doute, mais il permet de terminer certaines étapes qui aident à apprécier encore plus et davantage la Vie.
En fait, je ne m’oblige maintenant qu’ à bien vivre ce qu’il me reste à vivre. Sereinement… Très sereinement…
C’est l’essentiel…

Pendant les prochains jours, je verrai à préparer le jardin pour l’hiver…pour que tous mes plants vivaces demeurent magnifiques au printemps prochain… J’aime tellement jouer dans la terre… J’adore les fleurs….

Profitez de ces belles journées ensoleillées.
Claire.

P.S. C’est officiel ! Mon troisième roman pour adolescents sortira au Salon du Livre de Montréal. Il se nomme Un vilain guêpier. Je suis tellement contente….

jeudi 18 septembre 2008

Ma vie est courte…

Ma rencontre avec l’oncologue fut d’une grande franchise. Le cancer a bel et bien repris ses droits. Il ne m’aura donné que sept semaines de répit… J’étais pourtant en droit de m’attendre à six mois et plus… deux ans même de survie…

Selon les statistiques, on me donne un an ! Oui.,un an à vivre encore sur cette planète. Un an. Ou 12 mois. Ou 52 semaines. Ou 365 jours…
C’est ce que l’avenir me réserve maintenant…
Le cancer reprend sa place avec une grande détermination. Les cellules cancéreuses semblent devenues véritablement intelligentes. Elles ont réussi à passer au travers des effets néfastes du TAXOL et s’en immuniser… Elles ont agi si rapidement…Il ne leur a suffit que de quelques semaines seulement pour réattaquer…

Je ne croyais pas que cette récidive soit si rapide. Je suis vraiment étonnée…
J’ai un cancer en santé ! Un système immunitaire qui pète le feu !
On vise me donner d’autres chimiothérapies, mais évidemment ces traitements seront différents de ceux que j’ai reçus. Ils seront échelonnés sur cinq jours par semaine et ce, à toutes les trois semaines. Le poison sera moins fort, moins puissant, mais il aura de quoi faire peur quand même encore un peu aux métastases…

Ces chimios commenceront en novembre, dès mon retour de Provence.
Ce voyage que nous avions planifié Pierre et moi ne sera pas annulé… Ouf ! J’ai eu peur un peu…Mon oncologue reconnait l’importance de ce voyage surtout quand il risque d’être le dernier.
Bientôt, j’aurai un autre scan… On verra bien ce qui se passe à l’intérieur.

Je trouve difficile de vivre ce genre de moments. J’avais beau m’y attendre un peu mais l’annonce d’une telle nouvelle m’a fait l’effet d’un coup de poing. J’ai basculé…
Lors de mon retour, comme j’étais seule dans ma voiture, je me suis donné le droit de piquer une belle crise de colère. J’étais bouleversée. Au bout de quelques minutes, le calme est revenu dans ma tête, dans mon cœur. Faut savoir accepter l’inacceptable…
Puis, je me devais prioritairement annoncer tout ça à mes proches, soit mes cinq enfants que j’aime tant, mes deux frères et quatre sœurs et mes beaux-parents. Ce n’est pas facile… C’est dur, je trouve.

La vie continue…Elle a de ces exigences parfois…

Je suis contente de savoir la vérité. Je suis heureuse d’avoir l’heure juste sur le temps qu’il me reste. Ce temps qui m’appartient totalement. Ce temps sur lequel j’ai encore des droits.
Mon futur est court… Je comprends très bien que je ne pourrai me permettre de le gaspiller. J’ai des choix à faire… Je sais déjà que je n’écrirai pas un cinquième roman… Je vais pouvoir prendre le temps de lire tous ces livres qui m’attendent…Boire du vin aussi. Manger du chocolat. Me gaver de crème glacée. Mais surtout, aimer… Aimer. Aimer encore tous ceux qui m’entourent. Vous. Chacun de vous.

J’ai une année encore auprès de vous.

Contrairement à la personne qui meurt subitement ou des causes d’un accident, j’aurai la chance inouïe, car c’en est toute une, d’avoir le temps de faire mes adieux. Mes adieux à la vie, mes adieux aux êtres qui ont traversé mon parcours et qui l’ont enjolivé.
Je n’ai pas de regrets… J’ai eu une très belle vie…

C’est fou mais je me sens comme à la fin d’un beau voyage… lorsqu’on songe à plier bagages avant le retour à la maison, chez soi… Il y a un mélange de tristesse et de joie…

Je vous aime beaucoup. Et… Bon sang, prenez soin de votre santé…

Claire.

jeudi 4 septembre 2008

Fallait s’y attendre, je suppose !

Je suis au Brésil… À Sao Paulo, plus exactement. Pierre a affaires ici, jusqu'à demain, alors que nous quitterons pour Campinas rejoindre des amis pour la fin de semaine. Puis, ce sera l’envol vers Salvador…Je serai près de la mer… J’ai besoin, besoin, besoin d’être près de la mer… surtout depuis trente minutes…

Oui, depuis trente minutes, mon plaisir vient d’en prendre un fichu coup. Dans mon cou, là, où en décembre dernier, j’avais décelé une petite protubérance, se trouve une nouvelle petite boule bien dure… Au même endroit ! La même forme… Sous ma cicatrice… Maudit !

J’ai téléphoné à l’hôpital Charles Lemoyne, tentant de rejoindre mon infirmière pivot. Je veux un rendez-vous dès mon retour… Je veux une prise de sang et qu’on me révèle ce que mon marqueur, le CA125, a soudainement tant à me dire…

J’ai vécu sept semaines sans la protection de la chimiothérapie et vlan ! Je crois que mon cancer est en très bonne santé, fringant, excité quoi ! Pas moi…

J’ai eu le cœur gros évidemment… Je me suis donné le droit de pleurer un petit peu… J’ai compris que la bataille reprenait… Que peut-être, il y avait d’autres métastases qui se développaient dans mon corps, qui m’envahissaient sans que j’en sois consciente… J’ai eu peur… Puis, j’ai regardé au travers de la fenêtre de ma chambre d’hôtel… J’ai vu du haut de notre 15e étage, toute cette ville devant moi… Magnifique ! Non ! Le cancer ne viendra pas anéantir encore une fois mon voyage au Brésil, comme en janvier dernier… Pour le bien de mon moral, je crois qu’il serait sain que je ne m’accorde le droit de penser à la maladie que seulement quelques minutes, le temps d’écrire sur le blogue… puis je m’obligerai pour le reste de ce voyage à «oublier » volontairement ce métastase qui s’amuse à me défier en me faisant un pied de nez…
Non, le cancer ne me gâchera pas mon voyage. Je dois garder les yeux ouverts et admirer ce paysage gigantesque, sans laisser la tristesse m’envahir. La vie est trop belle, après tout !
Dieu que j’ai dont besoin de voir la mer… Dans quelques jours… Lundi…

Heureusement que vous êtes là… Je ressens déjà votre énergie me rejoindre et m’envelopper…
Merci…
Prenez soin de vous…
Claire.

mardi 2 septembre 2008

Une insomnie signifiante….

Je n’ai pas beaucoup dormi la nuit dernière. Mes pensées prenaient toute la place…
Un bilan ! Oui, c’est ce que je faisais dans ma tête. Qu’est-ce que la vie m’a appris depuis mes sept derniers mois… Beaucoup. Sur moi surtout. Sur les autres aussi…. Mais la plus grande chose que j’ai découverte est sans contredit combien la Vie est belle.

Oui, magnifiquement belle. Un véritable cadeau…

Je ne l’ai pas toujours appréciée à sa juste valeur. J’ai même osé parfois (pour ne pas dire pas mal de fois) la traiter d’insignifiante. J’ai même à peine rouspété quand, autour de moi, certaines personnes tentaient de me convaincre avec moult exemples à l’appui que « la vie est pleine de marde ». Le pire, je ne leur ai pas donné tort…

Aujourd’hui, je vois la Vie différemment.

Dommage que cette nouvelle vision me soit apparue si tard, alors que ma vie se fragilise… Oui, je la regarde différemment… et je suis tellement plus sereine.

Je vois la Vie dans ce qu’elle est et non dans ce qu’elle m’apparaît… et je la trouve sublime.

Je ne savais pas quand venant au monde, je venais vivre la plus belle expérience de mon existence. Car oui, j’existe… depuis fort longtemps. J’ai toujours existé d’ailleurs. J’existerai aussi toujours… C’est pourquoi je n’ai plus peur de ma mort… car elle, elle n’existe pas !
Oui, ma vie est une expérience que je suis venue vivre, découvrir, apprécier, endurer, subir même… Elle n’est pas une fin en soi…

Je suis profondément heureuse de toucher la beauté de la Vie…Tout a un sens maintenant pour moi. Une signification qui me transforme et me transporte plus loin que ma vie…
Je sais que certains n’imaginent pas à une vie après la mort. D’autre refusent même d’y croire….Pourtant, il me semble que c’est tellement évident….

C’est difficile à expliquer, mais je sais intrinsèquement maintenant que je suis venue expérimenter la condition humaine… Réaliser ceci, me transporte de joie…
C’est fou mais on dirait que je n’ai plus peur de la maladie et de sa souffrance.
Que je ne crains plus ma mort…

J’aime la Vie, c’est tout… et je la trouve immensément belle. Il y a comme une sérénité qui m’habite désormais…une paix, à vrai dire.

Je n’irai pas jusqu’à prétendre que le cancer est une bonne chose … mais il aura su m’ébranler, et m’obliger à prendre une pause et me questionner davantage… Oui, j’apprends à aimer ma vie, la Vie… et à vouloir la poursuivre le temps qu’il faudra sous un regard nouveau…
La Vie est belle… il m’a suffi de le reconnaître et d’ouvrir grand les yeux. Un cadeau, un trésor… Je suis chanceuse de vivre cette expérience humaine… Merci !

Je vous aime… à bientôt…

Je pars pour le Brésil avec mon Pierre.
D’ici mon retour, je vous en supplie prenez soin de vous et de votre santé.

Claire.