jeudi 22 mai 2008

Ayoye !

J’ai encore le goût de chialer depuis quelques jours…
Et je n’ai pas encore tout à fait le goût de sourire, et encore moins de rire…
J’attends seulement que la douleur disparaisse.
Je passe mes journées à me dire que la semaine prochaine, ça fera moins mal. Et j’ai raison… Mais bon sang, que la semaine est longue avant de rejoindre la prochaine…
Bon sang, que la douleur est vive malgré les médicaments qui engourdissent le mal.
Je me tape des douze à quatorze heures de sommeil en espérant qu’au réveil, la douleur se soit estompée… Pas vraiment… C’est-à-dire, qu’elle n’irradie plus tout mon abdomen comme au cours des premiers jours suivant la chirurgie. Maintenant, elle se concentre le long de la cicatrice et se fait tout un party !… Lors de mon opération, on a gratté et gratté dans ma chair, afin d’enrayer le plus de métastases possibles… Mon ventre n’est qu’une immense ecchymose… Ce n’est pas compliqué, j’ai peine à tolérer la couverture ou mes vêtements lorsqu’ils effleurent la peau du ventre… Ça élance ! Ça brûle…On dirait des coups de couteaux…
La souffrance physique… Pourquoi faut-il passer par là ? Je n’ai pas envie de le savoir. Je ne me sens pas l’âme d’une philosophe ces temps-ci. Je suis juste devenue une vieille malcommode qui cherche à fuir le mal qui l’habite.

La souffrance !
J’apprends à la connaître… Mais je me demande vraiment si cette rencontre est nécessaire… Elle me pousse aux confins de mon impatience… Elle m’empêche de voir plus loin que ma douleur. Pour vouloir vivre l’instant présent, laissez-moi vous dire que j’y touche et pas juste un peu… intensément même. Il est difficile de demeurer indifférent à la souffrance, tant celle des autres que la sienne. On ne peut pas l’ignorer…

Je sais, par contre, que ce mal va diminuer, et finir par s’éloigner de ma vie. Que je reprendrai le cours normal de ma vie, en jurant vraiment l’apprécier dorénavant et ce, à tous les futurs matins de ma vie. Comme c’est extraordinaire de se réveiller sans avoir de douleur… ! Je ne m’étais jamais attardée à cela, durant les 56 années de ma vie que j’ai vécues en parfaite santé… Cela faisait partie de l’ordre normal des choses, je suppose !

Ayoye !
Faut-il vraiment avoir mal pour apprécier les bienfaits de la santé ?
J’essaie de trouver une façon d’éviter que la douleur prenne toute la place dans chaque minute de ma journée. Pas si simple… Quand le corps a mal, il est difficile de se distancier de la souffrance. De la mettre de côté comme un gros paquet trop lourd à porter. J’essaie de me séparer d’elle. De l’observer…De la comprendre… Je n’y arrive pas… Elle fait partie de moi. En avant-plan. Elle me bloque la vue ! Me rend sourde même. Elle prend toute la place… J’aimerais tant m’en libérer… Du moins quelques heures par jour… Je me doute bien que dans quelque temps, je saurai supporter davantage sa présence puisqu’elle perdra de plus en plus de sa force, la guérison cherchant à l’anéantir… Je m’accroche à cet espoir. Je sais parfaitement que dans quelques semaines tout ceci sera derrière moi. Que je pourrai marcher un peu…
En tout cas, je sais ce que veut dire le mot douleur désormais.

Je sais ce que veut dire, le mot impatience. Le mot contrôle. Le mot épuisement. Le mot malcommode. Mais, à quoi ça sert de savoir la définition de tous ces mots ? Est-ce vraiment utile ? On dit que cela nous fait grandir… Est-ce vraiment nécessaire… ? Grandir…pourquoi ?
Bon, même écrire sur le blogue m’indispose parce que je demeure assise dans la même position…

Depuis une semaine, je vous démontre tout le mauvais côté de ma personne… mon mauvais caractère impatient.
Je suis comme un petit chien qui jappe tout le temps…Ou un bouledogue. Je suis comme ça dans ma tête, seule avec moi-même… Je ne le suis pas trop envers le monde qui m’entoure et qui prenne soin de moi, heureusement. Mais dans ma tête, oh que oui ! Et comment…
Faudrait que je respire par le nez ! Faudrait que je me dise qu’il y en a des pires que moi, cent millions de fois pires que moi. Faudrait que je me dise que ce mal est nécessaire puisqu’il m’apporte une portion de guérison, une année de plus sur cette planète. Faudrait que je me dise, faudrait que je me dise, faudrait que je me dise…
J’ai mal… bordel de bordel ! Je suis tannée d’endurer…
Je me suis encore vidée le cœur sur vous…
Merci.
Il me semble que j’ai moins mal…
Je vous aime… Pardonnez-moi de chialer depuis quelques jours…
Dans le fond, je devrais accepter de brailler un bon coup pour me vider de cette peine que j’ai de plus en plus de difficulté à raisonner.
Brailler juste pour brailler, me faire du bien, à défaut de ruer dans les brancards parce que ça me ferait trop mal…

Claire.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonsoir Claire,
Tu ne le sais peut-être pas, mais tu soulèves dans ton dernier message tout un débat qui se discute ici en Ontario. Tout récemment un petit garçon de 11 ans a refusé un traitement de chimio....Parce que c'était trop dur pour lui...Ses parent l'ont appuyé mais l'Aide à l'enfance a intervenu et a pris l'enfant sous sa garde. Il a eu son traitement et le juge a permis le retour en famille sur condition que le traitement se poursuive.

Que pouvons-nous imaginer de la douleur associée au traitement d'un cancer? Tes propos nous en font connaître qu'une minime portion du courage requis pour passer à travers.

Ce matin, à l'émission CBC The Current, Anna Marie Tramonti a fait une entrevue avec une dame qui en est au stage 4 metastasé du cancer. Elle est mère d'un garçon de 11 ans je crois. Elle a été très franche en parlant de la douleur des traitements et tout au long de cette entrevue j'ai pensé à toi, et je me suis dit que si tu avais un moment tu devrais écouter cette femme. Elle saura t'inspirer sûrement. Peut-être pourrais-je t'aider à la retrouver pour échanger? Elle est comme toi, elle va vivre malgré tout et elle va s'en sortir. J'ai entendu les années devant elle dans sa voix. Je le crois Claire, le Mal va passer et tu t'en sortiras.

Grosses bises,
Mikale

Anonyme a dit…

Hey salut à toi,

Ça se peut-y que tu aurais le droit de chialer parce que tu as mal? Il me semble que c'est tout à fait légitime. Faut pas s'excuser dans ton cas et se sentir coupable. Je sais que moi si j'étais constamment en douleur je réagirais comme toi. Je me plaindrais car j'ai beaucoup de difficulter à ''dealer'' avec la douleur physique. C'est un des mal que je supporte le moins.

Je sais qu'il y a des gens pire que toi, cela existera toujours, mais il y a aussi des gens moins pire que toi et quand on pense à cela on sent comme une injustice lorsqu'on est dans la douleur.

C'est de même, c'est de même. La douleur fait partie d'être un être humain mais quand il y en a trop on peut sauter sa coche.

Bon courage ma belle, je sais par quoi tu passes et c'est loin d'être facile. Tu as le droit de chialer, c'est normal.

JE T'embrasse

Louise

danielle michaud a dit…

je passe voir les gens qui recoivent des traitements de chimio.et je déconne,je fais rire ces êtres qui souffrent.Claire,je ne sais pas si tu me trouverais drole ,ils aiment que je passe par là.Le copain de la fille de mon amie Ginette est devenu un stomisé,il a 37 ans.J'ai pensé à Jacques,il nous avait fais rire quand il a dit" je suis devenu un SODOMISÉ de la Mauricie"Grosse faute mais il a tellement ri et tout le monde dans sa chambre.Claire tu crois être chialeuse tant mieux tu as ce droit Je t'aime et te fais un GROS CALIN Danielle